
Réfugié politique salvadorien et membre du cercle littéraire Xibalbá (l’un des groupes les plus importants de l’histoire littéraire du Salvador et l’un des plus touchés pendant la guerre civile), Dagoberto a vécu chez moi de 1990 à 1992. Lorsque des accords de paix ont été signés entre la guérilla et le gouvernement, Dago est rentré au Salvador mais le contact n’a pas été rompu entre nous. Ci-dessous quelques extraits traduits en français d’un courriel qu’il m’a envoyé en septembre 2000. Dans ce courriel, il passe le bonjour à tous les camarades qu’il a connus en France, salue mes parents (qui l’avait accueilli plusieurs fois chez eux), fait la bise à ma fille Chloé (qu’il considérait comme sa petite sœur) et évoque la situation au Salvador…


ma mère, Dago et Charly – Lille – 1991
Extraits des nouvelles envoyées en sept. 2000 par Dago :
Je travaille actuellement dans le secteur de l’éducation à La Alcaldia de San Salvador (une municipalité gagnée par la gauche). Je ne me sens pas très proche de l’idéologie du FMLN (front constitué de plusieurs partis de gauche)… peut-être parce que j’ai beaucoup appris des libertaires français, toi et José Faran en particulier ! Je me considère d’ailleurs moi-même comme libertaire et j’ai une certaine influence sur mes amis (qui s’identifient de plus en plus à ces idées).
Ici, le syndicalisme est très faible. L’Armée et les escadrons de la mort ont exterminé pendant la guerre la plupart des responsables syndicaux. Aujourd’hui, ceux qui restent sont vendus aux intérêts des possédants. Seule la corporation médicale possède une certaine force. Par ailleurs, l’influence des partis de gauche sur les syndicats n’existe plus comme avant et pendant la guerre… et c’est positif. Ceci étant dit, les syndicats n’ont pas la force suffisante pour revivre par eux-mêmes.
L’un des partis de droite actuellement au pouvoir, l’Alliance Républicaine Nationaliste (les ex escadrons de la mort), souffre d’une grave crise interne. D’autre part, le gouvernement est impliqué dans une affaire d’espionnage téléphonique au détriment de ses adversaires politiques. Il semblerait que l’entreprise France Télécom (qui a racheté le réseau téléphonique salvadorien) soit également touchée par cette affaire.
A gauche, le FMLN connait lui aussi une sérieuse division. Il y a deux tendances très fortes : les rénovateurs (qui ont perdu les idéaux révolutionnaires) et les orthodoxes (qui rêvent encore de… Marx, Lénine et Staline !). Beaucoup de personnalités du FMLN qui représentaient un poids intellectuel important se sont retirées et il ne reste que des incapables.
Sur le plan économique, la situation est très contrastée. D’un côté, la technologie de pointe est de plus en plus présente (ordinateurs, téléphones cellulaires, etc.). De l’autre, la pauvreté extrême (générée par le néo-libéralisme) mène le pays à une véritable catastrophe. La délinquance fait des ravages et le système de santé publique fonctionne très mal.